Le Prolétaire N° 8 (Mai 1987)
Le prolétaire N° 8. Mai 1987
[L'intérêt de ce document réside en ce qu'il décrit de façon presque prémonitoire l'opportunisme ambiant qui règnait sous la Révoultion du 4 août au Burkina Faso et qui a abouti à la restauration après l'assassinat du Président Thomas Sankara le 15 octobre 1987.]
EDITORIAL
La période qui s'annonce est une période qui, aussi bien sur le plan théorique que pratique, sera très enrichissante pour le processus révolutionnaire en général et les militants révolutionnaires en particulier. Du point de vue théorique, il faudra savoir appréhender correctement les difficultés à venir et formuler des propositions adéquates. Du point de vue pratique, c'est-à-dire de la lutte pour les transformations révolutionnaires, les militants révolutionnaires seront confrontés à la résolution de tâches d'une complexité et d'une difficulté insoupçonnées jusque-là. C'est dire donc que c'est une période qui s'annonce riche d'épreuves au cours de la laquelle nous aurons à subir des échecs mais aussi à enregistrer de nombreuses victoires.
Jusqu'à présent la révolution a su déjouer les agressions extérieures dirigées contre elle. Toutes les énergies ont été mobilisées dans cette lutte au détriment du danger intérieur qu'est l'opportunisme. L'opportunisme dans la révolution participe du processus de restauration qui est la stratégie principale de la bourgeoisie à l'heure actuelle. Dans la poursuite de cet objectif stratégique, la bourgeoisie met en œuvre diverses tactiques, les unes à la suite des autres. Aujourd'hui, elle trouve dans la petite bourgeoisie des auxiliaires qu'elle utilise comme ses chargés de mission. Cela, la Révolution doit en avoir conscience et s'organiser de manière à réserver une réplique conséquente aux tentatives bourgeoises de restauration par l'entremise de ses auxiliaires. La bourgeoisie attaque la Révolution dans tous ses tenants et aboutissants.
L'ULC (R) en tant qu'organisation qui participe à la consolidation et au développement de la Révolution, n'est pas épargnée par ses attaques.
Et notre organisation aujourd'hui qu'elle s'est séparée des détachements de la bourgeoisie en son sein, est à même de contribuer plus efficacement à la lutte révolutionnaire des masses et à la faillite de la stratégie et de la tactique bourgeoises de restauration.
La parution du n° 8 du « Prolétaire » atteste, si besoin en était, que l'ULC (R) se porte bien. Quand ça va mal, c'est que ça va bien. Lorsque les réactionnaires, les opportunistes et tous les ennemis de notre organisation pensent que ça va mal pour elle, l'ensemble de ses militants savent que ça va bien. Nous sommes chaque fois méfiants lorsque les opportunistes et les réactionnaires nous apprécient positivement. Et nous nous demandons, qu'avons-nous pu faire qui puisse tant leur plaire ?
La parution du n° 8 du « Prolétaire » sous ce format et après un long silence marque une phase décisive dans la vie de notre organisation et dans sa capacité à participer efficacement à la lutte révolutionnaire des masses. Lorsqu'une organisation se sépare de ses opportunistes, de ces traîtres, elle ne s'affaiblit pas, elle se renforce. Elle perd en nombre mais se renforce en qualité. Sa cohésion devient plus solide et sa combattivité beaucoup plus grande.
Dans ces pages, nous nous proposons de faire une simple introduction quant à la contribution que nous aurons à apporter dans la lutte contre l'opportunisme qui devient de plus en plus un phénomène dangereux. Nous sommes convaincus quant à la faillite certaine de l'opportunisme.
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INTRODUCTION A LA LUTTE POUR LA FAILLITE DE L'OPPORTUNISME DANS LA REVOLUTION
A l'approche de la commémoration de la fête du Travail, toutes les forces sociales de notre pays s'activent. La marque particulière de la commémoration du 1er mai dans notre pays depuis la date historique du 4 août 1983, réside dans le fait que les instances du pouvoir s'associent aux travailleurs organisés dans la manifestation.
Auparavant, la commémoration du 1er mai était une action des organisations syndicales dirigée contre le pouvoir en place, pouvoir caractérisé d'anti-travailleurs.
Aujourd'hui, du fait du processus de la Révolution démocratique et populaire en cours dans notre pays, le Conseil national de la révolution et le gouvernement révolutionnaire se sont engagés à œuvrer dans l'intérêt de l'immense Majorité du peuple avec la participation de l'immense majorité.
Si aujourd’hui du fait de l'incompréhension de certaines couches des travailleurs — incompréhension créée par des agents auxiliaires de la bourgeoisie au sein du milieu ouvrier — l'on assiste à des initiatives différentes pour commémorer un même évènement dont le sens et la portée sont reconnus de tous, il est cependant permis de croire que le temps n'est plus loin où la barrière que l'on a érigée entre les travailleurs et le pouvoir s'estompera définitivement. Alors, les travailleurs s'identifiant au pouvoir, le pouvoir étant exercé par les travailleurs, cela marquera l'unification de toutes les forces sociales du progrès de notre pays engagées dans une bataille commune.
Notre révolution comme toute révolution, est un processus de transformations sociales. Il arrive que dans un tel processus, certains secteurs de la vie retardent sur l'ensemble et que certains autres soient trop en avance.
Seule notre foi en la Révolution, notre engagement constant à œuvrer pour l'émancipation des travailleurs des villes et des campagnes, nous permettra d'unir tout le mouvement pour la réalisation des objectifs de la Révolution.
On a beaucoup dit et écrit sur le 1er mai. Il importe aujourd'hui en revenant sur le thème, d'insister sur les enseignements que les militants révolutionnaires doivent savoir faire leurs, surtout dans un contexte national où l'opportunisme en général et particulièrement l'opportunisme arriviste petit-bourgeois prend du poil de la bête. L'opportunisme arriviste petit-bourgeois, un opportunisme de droite, est devenu un grave danger qui menace la Révolution d'août. Il nous faut le conjurer. Aussi, une étude approfondie et ce du point de vue tant de la théorie que de la pratique s'impose. C'est une telle étude que nous nous proposons de faire en guise de contribution à la commémoration du 1er mai.
Chaque pays, chaque peuple est appelé à fêter cette date en s'inspirant de ses réalités propres et en partant de ses préoccupations essentielles.
Quelles sont les réalités qui nous sont propres aujourd'hui au Burkina Faso ?
Pays agricole arriéré, engagé dans une lutte révolutionnaire contre la domination impérialiste, le Burkina Faso est en pleine mutation économique, sociale et culturelle. La lutte de classes qui s'y déroule est une lutte de classes des masses révolutionnaires. Et le mouvement n'ira de l'avant, ne s'approfondira, qu'en rejetant de son sein les traîtres et les félons, tous ces arrivistes petits bourgeois gagnés à l'influence de la bourgeoisie et qui continuent de chercher à tromper les masses.
Chaque jour qui passe, le militant révolutionnaire engagé dans l'action des masses, se convainc un peu plus davantage que les intérêts du prolétariat et de la bourgeoisie sont si contraires que leurs aspirations ne peuvent cohabiter que pour un temps, mais ne peuvent jamais être unies.
Il s'en suit que tôt ou tard, le prolétariat devra se séparer de la bourgeoisie et de ses auxiliaires pour former son parti ouvrier.
Et quelles sont les préoccupations essentielles de notre peuple révolutionnaire à la veille de ce 1er mai 1987 ?
Le 4 août 1983, la bourgeoisie réactionnaire a été renversée du pouvoir. Elle n'a pas été battue. Elle n'a pas non plus renoncé à la reconquête de son pouvoir. Elle œuvre dans le noir à la restauration de l'ancien régime. Pour ce faire, elle ne dort pas, elle se déguise en révolutionnaire. Elle utilise l'arme de la corruption pour noyauter et gangrener le processus révolutionnaire. Elle trouve un appui au sein des petits bourgeois veules, couards, poltrons et aux appétits démesurés. Elle suscite et entretient l'arrivisme de la petite bourgeoisie pour en faire un allié, un auxiliaire dans son œuvre de restauration. Telle est la signification de l'existence de l'opportunisme arriviste de la petite bourgeoisie comme courant politique. L'arrivisme petit bourgeois est un opportunisme achevé, acheté et soudoyé par les « bonnes petites places » et les bons petits placements. Il se développe de façon inquiétante. Il faut le conjurer ou c'est lui qui détruira la Révolution. Et c'est cela la préoccupation essentielle du peuple révolutionnaire de notre pays à la veille de ce 1er mai.
L'étude d'un tel phénomène devenu aujourd'hui courant sous la Révolution démocratique et populaire, est une arme de plus aux mains de militants sincères et dévoués dont la foi en la victoire de la Révolution est inébranlable, dans leur lutte quotidienne contre les affronts conjugués des divers opportunistes qui foisonnent comme des bactéries en champ de culture.
Pour ce faire, nous devons nous poser les questions suivantes :
- quels sont les enseignements que les militants révolutionnaires doivent avoir à l'esprit chaque fois qu'à l'occasion du 1er mai, les travailleurs du monde entier se réunissent pour affirmer l'internationalisme de leur lutte contre l'injustice, l'oppression et le capital international.
- Pourquoi faut-il que le 1er mai cesse d'être fêté de façon formaliste, routinière pour devenir une occasion pour les travailleurs d'affirmer leur détermination à lutter pour l'amélioration de leurs conditions de vie ?
I- 1er MAI : SIGNIFICATION ET PORTEE INTERNATIONALE DE SA COMMEMORATION
1.1. Aperçu historique
C'est au congrès de l'American Fédération of Labor (AFL) tenu au mois de novembre 1884 à Chicago qu'apparaît pour la première fois l'idée de faire du 1er mai une journée revendicative ouvrière pour l'obtention des « huit heures » de travail. Comment cette date qui correspondait à une fête locale marquant le commencement de l'année de travail pour le louage de service est-elle devenue la journée de tous les travailleurs du monde ?
Le congrès de l'AFL de Chicago s'était fixé le 1er mai 1886 comme date limite pour la constitution dans chaque ville du front unique de toutes les organisations syndicales et la communication aux employeurs d'un contrat-type qui formule les termes de la réduction de la journée de travail à huit heures. Lors de ce 1er mai, partout les travailleurs organisèrent d'importantes manifestations sur le mot d'ordre uniforme :
« A partir d'aujourd'hui, nul ouvrier ne doit travailler plus de huit heures par jour !
Huit heures de travail !
Huit heures de repos !
Huit heures d'éducation ! »
A Milwaukee, cette journée fut marquée par une tache de sang. Il y eut un affrontement entre les forces de police envoyées sur les lieux et les travailleurs mobilisés qui n'avaient pour arme que leur poitrine et leur foi en la justesse de la cause qu'ils défendaient. Il y eut une fusillade et des morts (au nombre de neuf) dans les rangs des travailleurs. Cette journée sanglante allait être le prélude d'autres journées encore plus sanglantes.
Ainsi le 3 et le 4 mai à Chicago se produisirent des événements plus tragiques encore qui devaient assurer au 1er mai 1886 et à la date du 1er mai en général un retentissement mondial.
Le capitalisme dans son exploitation sauvage et cruelle, avait réduit l'ouvrier à la condition d'une bête de somme. Et face aux revendications sociales des travailleurs, les capitalistes trouvaient que le plomb était la meilleure réponse que l'on puisse leur réserver.
« La prison et les travaux forcés sont la seule solution possible de la question sociale. Il faut espérer que l'usage en deviendra général » disaient-ils. C'est ainsi que la préservation des intérêts égoïstes pouvaient aveugler les propriétaires capitalistes jusqu'à les rendre inhumains.
7 000 à 8 000 grévistes, ouvriers travaillant dans une grande usine de machines agricoles décidèrent de se porter à la sortie de l'usine pour manifester contre le licenciement abusif de 1 200 d'entre eux et leur remplacement par des «jaunes» (les briseurs de grèves). Ils se heurtèrent aux forces policières. De la foule, dit-on, partirent quelques coups de revolver et une fusillade dans la mêlée s'en suivit. Bilan : plusieurs morts et blessés graves.
L'indignation des travailleurs ne se fit pas attendre. Elle se traduisit par l'appel suivant :
« La guerre des classes a commencé.
Hier on a fusillé les travailleurs en face de l'usine MC Cormick.
Leur sang crie vengeance ! Qui pourrait douter que les tigres qui nous gouvernent sont avides du sang des travailleurs !
Mais les travailleurs ne sont pas des moutons.
A la Terreur-Blanche, ils répondront par la Terreur-Rouge.
Mieux vaut la mort que la misère !
Si l'on fusille les travailleurs, répondons de telle façon que nos maîtres s'en souviennent longtemps.
C'est la nécessité qui nous fait crier : « aux armes ».
Hier les femmes, les enfants de pauvres pleuraient leurs maris et leurs pères fusillés. Tandis que dans les palais, les riches remplissaient leurs verres de vins coûteux et buvaient à la santé des bandits de l'ordre...
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Séchez vos pleurs, vous qui souffrez !
Ayez du cœur, esclaves! insurgez-vous! ».
Le mouvement ouvrier étant noyauté par des groupes anarchistes connu des travers, ce qui permit à l'instruction policière de mettre en cause des militants longtemps recherchés et dont on tenait ... à se débarrasser, espérant ainsi en finir avec le mouvement.
Le procès de Chicago qui suivit l'arrestation de dirigeants de milieu ouvrier prononça des condamnations à mort. Ces militants devant leurs bourreaux affirmèrent leur foi inébranlable à la cause qu'ils défendent, et dont la mort a permis à la cause ouvrière d'avancer ont pour nom SPIES, FIELDEN, NEEBE, FISHER, SCWAB, LINGG, ENGEL et Albert PARSONS.
Devant leurs bourreaux, ils ont tenu ferme. Face à la menace de mort, ils se sont pas reniés. Ils se sont plus que jamais assumés.
Parsons, qui avait pu échapper aux mailles de la police, fit preuve de courage et d'honnêteté vis-à-vis de ses camarades, en se constituant prisonnier le jour de l’ouverture du procès, afin de partager le sort de ses camarades. Il ne recula pas et chercha comme il l'a dit à « monter, si c'était nécessaire, sur l’échafaud pour les droits du travail, la cause de la liberté et l'amélioration du sort des opprimés ».
Le procès de Chicago fut l'histoire de la condamnation de militants révolutionnas prolétariens. Le langage des représentants d'une classe. C'est un langage différent des propos avec lesquels les « héros » en temps de de paix dans notre pays nous ont assez familiarisés.
Face aux représentants de la classe des capitalistes, les condamnés de Chicago s'exprimèrent en ces termes :
« Si la mort est la peine qui doit frapper la proclamation de la vérité, alors, je serai fier d'en payer le prix ! Pendez-moi » (NEEBE)
« Si ma vie, doit servir à la défense des principes du socialisme et de l'anarchie, tels que je les ai compris et dont je crois honnêtement (souligné par nous), qu'ils sont dans l'intérêt de l'humanité, je vous déclare que je suis heureux de la donner ; et c'est un très bas prix pour un si grand résultat » (FIELDEN).
« Du fait de la grande et noble cause pour laquelle je m'apprête à mourir, ma route vers l'échafaud sera facile » (FISHER).
Comme ces héros morts pour l'émancipation de la classe ouvrière sont différents des fanfarons de nos jours qui se réclament dignes représentants du Prolétariat burkinabè, se proclament des Marxistes-Léninistes « intègres » mais qui préfèrent être « des héros vivants que des héros morts » !
Le 20 août 1886, la sentence rendue, condamna à la pendaison les huit accusés.
De l'aveu même d'un des jurés une fois hors du tribunal, « la pendaison s'explique par le fait que ce sont des hommes trop dévoués, trop intelligents, trop dangereux pour nos privilèges » ; c'est clair !
SCHAWB et FIELDEN furent graciés et leur peine commuée en prison perpétuelle.
NEEBE s'en tira avec 15 ans de prison. LINGG se suicida pensant par cet acte sauver ses camarades.
Le 11 novembre 1887, quatre d’entre les accusés furent suppliciés.
Ils moururent héroïquement, coupables d'avoir parlé de justice et de liberté.
SPIES avant que l'on ne tire sur la corde eut le temps de prononcer ces mots prophétiques « salut temps où notre silence sera plus puissant que nos voix qu'on étrangle dans la mort ».
Fisher ajouta « voici le plus heureux moment de ma vie ».
Aujourd'hui, l'on se rend bien compte que le sang versé par ces martyrs de Chicago ne fut pas vain. Aujourd'hui, en jouissant des huit heures de travail par jour, chaque travailleur doit avoir présent à l'esprit que ce fut le résultat de l'action courageuse d'hommes qui l'on payé de leur vie. Et que c'est parce que des hommes ont osé affronter la mort, que la date du 1er mai est devenu une fête internationale des travailleurs.
Si aujourd'hui, nos revendications ne sont plus les huit heures de travail, et se posent en termes d'indépendance économique, de démocratie et de liberté, il n'en demeure pas moins que dans les rangs des opprimés, les « Jaunes » existent, les briseurs de grèves persistent et œuvrent à saper l'action des combattants, l'action de ceux qui osent lutter pour vaincre.
Par-delà la revendication des huit heures, le 1er mai est devenu une manifestation de tous les opprimés. Au Burkina Faso, le 1er mai ne se conçoit que s'il est la manifestation de tout un peuple mobilisé pour lutter contre la domination et l'exploitation impérialiste, contre les entraves de l'ordre social traditionnel.
Le 1er mai ne peut se concevoir autrement par notre peuple, qu'en termes de lutte pour l'amélioration des conditions de vie de larges masses de travailleurs des villes et des campagnes, ce qui passe par la lutte résolue contre l'impérialisme et ses alliés nationaux. La revendication au bien-être, à la démocratie et à la liberté se résume en un engagement réel dans le processus de transformations révolutionnaires entrepris depuis le 4 août 1983.
1-2 - Le contenu et la signification du 1er mai 1987 au Burkina Faso
Les travailleurs de notre peuple ont très tôt, dès les premières années de l'indépendance politique de notre pays, toujours été habités par la conscience de la lutte contre l'injustice, l'exploitation et l'oppression impérialistes.
Très tôt, ils ont su se doter d'organisations combatives à même de lutter pour la défense de leurs intérêts face à des pouvoirs néocoloniaux qui se sont succédés. La tradition de lutte de nos organisations syndicales a débordé nos frontières par sa renommée. Elle a su préserver les libertés démocratiques dans notre pays, favorisant ainsi l'expression des idées anti-impérialistes et l'épanouissement d'une conscience de lutte anti-impérialiste. Il arriva un moment dans l'histoire des luttes sociales de notre pays où les revendications purement économiques ont revêtu une signification anti-impérialiste ; ce qui a attesté de l'élévation du niveau de conscience politique de nos travailleurs organisés. Dès lors, les questions de revendications économiques, de libertés démocratiques ne s'exprimaient qu'en termes de lutte anti-impérialiste.
Rares sont les syndicats qui n'avaient pas opté pour une orientation politique anti-impérialiste. C'est toute cette situation créée par l'activité politique de militants révolutionnaires qui a favorisé l'avènement de la Révolution démocratique et populaire à travers ses diverses péripéties.
C'est toute cette situation qui a préparé la manifestation grandiose de la jeunesse de notre pays lors des événements du 17 mai 1983, manifestations qui ont revêtu un caractère anti-impérialiste et anti‑réactionnaire nettement marqué.
La croissance du mouvement anti-impérialiste des masses laborieuses dans notre pays ne s'est pas faite sans reflux. Ainsi, lors de la période la dictature « militaro-réformiste » du régime du colonel Saye Zerbo, le mouvement syndical fut réprimé et bâillonné. La démobilisation commença à gagner les travailleurs, cependant que le régime dictatorial consolidait son système de dictature en vue d’abattre sur notre peuple une « Terreur‑Blanche ».
Les militants de notre organisation à tous les niveaux du secteur d'activité de notre peuple ont contribué à l'essor du mouvement révolutionnaire dans notre pays. L'annonce de la période sombre de la démocratie dans notre pays a coïncidé avec la naissance en notre sein des courants opportunistes liquidateurs qui se sont constitués autour de chamailleries d'émigrés vivant dans l'ignorance de notre peuple. L'anarchisme et l'action spontanéiste (donc opportuniste) de certains créèrent les conditions favorables à une certaine « majorité » (des « bolcheviks ») pour opérer une scission, portant ainsi un coup mortel à l'organisation. Dans ces conditions, peut-on aller en guerre, les rangs dispersés et en comptant en son sein des agents de la cinquième colonne ?
L'aventurisme est le propre d'éléments anarchistes, non la caractéristique de révolutionnaires conséquents. Ce sont les conditions qui prévalurent à la dissolution de notre organisation. Il est loisible à ceux-là mêmes, qui, de par leurs actions anarchiques et spontanéistes, ont œuvré à liquider l'organisation, et qui à mille lieux de l'action concrète, clament aujourd'hui que ce fut là un acte de traitrise. Il n'y a que des Renégats qui se renient, qui renient leur conviction d'hier, rejetant leurs responsabilités sur les autres.
Et c'est faire preuve d'attitude responsable que d'assumer l'irresponsabilité des uns, l'inconséquence et l'opportunisme des autres. C'est pourquoi, les militants conséquents ont toujours assumé avec esprit de suite leurs insuffisances, erreurs et inconséquences, conscients que c'est dans la lutte révolutionnaire des masses que le militant guérit de ces insuffisances et corrige ses pratiques erronées.
S'il y a une chose d'absolument certaine, que même la morale « féodalo-bourgeoise » ne saurait tolérer à fortiori la morale des masses révolutionnaires, c'est d'accepter de militer côte à côte, avec des éléments que l'on sait traîtres, accepter de vivre une vie de camarade avec de tels éléments pour se « ressaisir » un jour, après des années de cohabitation en les dénonçant comme traîtres. De tels comportements et attitudes sont tout simplement irresponsables et couvrent de honte ceux qui les adoptent. Mais là n'est pas notre propos.
La dictature militaire de type fasciste teintée de réformisme ne fit pas long feu, tant le sentiment d'attachement aux libertés démocratiques, par conséquent le sentiment de lutte anti-impérialiste, avait pris d'assaut et de l'intérieur, les casernes militaires. Les contradictions au sein de l'armée aboutirent à l'avènement du CSP, débarrassant ainsi notre peuple de la junte militaire fasciste du CMRPN.
La période du CSP, malgré ses contradictions internes, ouvrit de larges perspectives pour la lutte révolutionnaire des masses. L'aspiration des masses populaires à la démocratie et à la révolution comme solution véritable à leurs maux, jeta dans une peur panique les réactionnaires de notre pays qui mirent tout en œuvre pour l'endiguer.
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Le 17 mai 1983 est la réponse de l'alliance des classes réactionnaires aux revendications de liberté, de démocratie des masses révolutionnaires. Mais, la réaction de celles-ci ne se fit pas attendre. Elle fut à la dimension de l'affront.
La jeunesse de notre peuple, la première, envahit les rues pour crier son indignation. La guerre des classes venait de commencer et devait voir son dénouement dans la nuit du 4 août.
Qui pourrait douter qu'en cette occasion notre jeunesse a offert sa poitrine comme cible à la main armée de la réaction ? Qui pourrait douter que dans cette bataille décisive, des militants révolutionnaires ont été déterminés à payer de leur vie, afin d'assurer la victoire des masses ? Certainement, ceux-là seuls peuvent en douter, qui étaient à mille lieux d'ici, ou qui se tenaient distants, en spectateurs passifs mais tout de même sympathisant avec les masses; le type même d'attitude contemplative propre aux intellectuels oisifs, théorisant pour savoir si nous ne nous étions pas engagés dans un processus de pseudo-révolution.
Le peuple est dans la rue, le peuple envahi les casernes pour réclamer des armes afin de pouvoir se battre côte à côte avec ses frères soldats, et il se trouve des "révolutionnaires" en train de se questionner sur la nature du mouvement ! Mais, une fois que le mouvement des masses révolutionnaires est devenu le mouvement au pouvoir, les interrogations cesseront pour trouver une réponse : « c'est une Révolution Démocratique et Populaire, à qui il faut la direction du Parti de la classe ouvrière pour assurer sa transition vers le socialisme». Les spectateurs d'hier posent alors comme condition l'éviction des lutteurs d'hier qui sont « fatigués » et dont il faut se débarrasser par une alliance « sacro-révolutionnaire » afin d'assurer la transition au socialisme. Pire, des éléments qui se trouvaient de l'autre côté de la barrière, armés jusqu'aux dents pour assurer la défense des intérêts des classes et couches sociales-réactionnaires alliées à l'impérialisme mus par quels soutiens on ne sait, en imposent aujourd'hui à ceux sur qui ils étaient prêts à tirer parce qu'ils ont osé militer pour l'avènement de la Révolution.
Le mouvement de mai 1983 a formulé l'aspiration du peuple à la révolution. Il l'a posé. Le 4 août 1983 a résolu la question du pouvoir de la Révolution.
Aujourd'hui, mai 1987, la bourgeoisie aidée par ses auxiliaires de la petite bourgeoisie arriviste, formule les termes de la restauration. Elle les pose.
C'est pour que cette question posée par la bourgeoisie et ses auxiliaires restent à l'état d'une question posée, qu'il faut que, en ce jour du 1er mai 1987, les travailleurs révolutionnaires, les militants révolutionnaires prennent conscience de l'enjeu de la lutte. Que s'inspirant des enseignements du mouvement des masses révolutionnaires de mai 1983, ils se mobilisent davantage pour barrer la route à la restauration bourgeoise réactionnaire.
1er mai, 17 mai, deux dates qui, pour le peuple révolutionnaire du Burkina Faso, doivent revêtir le même contenu et la même signification.
Dans la commémoration de ces deux dates, notre peuple doit être conscient que la revendication du pain, de l’eau et de la démocratie se pose toujours dans les termes de la lutte anti-impérialiste et anti-réactionnaire.
Le peuple doit être conscient qu'il a en face un pouvoir qui se veut populaire et qui réclame sa participation à tous les niveaux. Un pouvoir qui reconnait expressément qu'il n'a pas de solution à proposer en dehors du peuple. Car celui-ci est à même de déterminer ses besoins fondamentaux et les tâches relatives à leur satisfaction.
Un pouvoir qui éduque notre peuple afin qu'il cesse de nourrir son appétit en fonction du fond de l'assiette du voisin.
Un pouvoir qui affirme sans ambages, que désormais le peuple de notre pays ne mangera que ce qu'il est à même de produire. Et puisque le peuple aspire à manger beaucoup plus, il produira alors davantage.
En dehors d'une telle perspective, il n'y a pas de salut; c'est la voie de l'indépendance ; celle de l'auto-gouvernement ; la voie de la démocratie vraie. C'est la Révolution Démocratique et Populaire.
Cette voie n'est la volonté d'aucun individu pris en tant que tel ; c'est la nécessité historique du développement social qui nous le commande. Pour l'acquisition de toute chose, il y a un prix à payer. Chaque peuple est appelé à payer son prix du développement. Si ce n'est demain, ce sera après-demain. Plus le temps passe, plus la facture devient coûteuse. L'essentiel pour un peuple, c'est de se convaincre que ceux qui le gouvernement le font dans son intérêt et avec lui. Si ceux « d'en haut et ceux d'en bas » aspirent à la même chose, en ayant des intérêts convergents, ils ne sauraient avoir de langage et de pratique différents. Il ne peut que subsister des incompréhensions que les uns et les autres doivent travailler à lever.
Notre révolution a besoin de syndicats des travailleurs tout comme des Comités de Défense de la Révolution. Mais un syndicat aujourd'hui au Burkina Faso, encore plus qu'hier ne saurait confiner ses activités dans des luttes purement corporatives, avec pour thème de mobilisation « la lutte contre la baisse du pouvoir d’achat».
C'est un thème rabâché et devenu usé et qui a perdu de son pouvoir magique. Personne ne doute du fait qu'il faille élever le niveau du pouvoir d'achat de nos travailleurs des villes qui sont cependant dans une situation plus confortable que nos travailleurs des campagnes.
Le thème qui doit être mobilisateur, c'est celui de chercher les voies et moyens pour produire plus en vue de consommer plus, car c'est cela que vise la revendication de l'élévation du pouvoir d'achat. Aujourd'hui, en plus de la lutte pour détruire les assises économiques et sociales des classes exploiteuses, du fait même de l'arriération de notre pays, nous sommes confrontés à la tâche plus difficile de l'organisation. Et dans cette tâche, nous devons savoir associer toutes les forces démocratiques et de progrès. Cette tâche nécessite la participation des syndicats des travailleurs, des syndicats de travailleurs qui cessent d'être corporatistes pour devenir des syndicats révolutionnaires.
Ces syndicats révolutionnaires dans leurs activités participatives, doivent être invités à se prononcer sur toutes les questions de la révolution en vue de mieux définir leurs actions. C'est cela la pratique de la démocratie dans le processus de la révolution populaire. Toute autre attitude aura pour conséquence de restreindre le champ de mobilisation en faveur des transformations révolutionnaires.
Commémorons donc cette date du 1er mai 1987 autour du mot d'ordre suivant : Pour une union de toutes les forces démocratiques et de progrès dans la défense de la démocratie politique, économique et sociale à travers le processus de la Révolution Démocratique et Populaire.
Pour une lutte résolue afin de barrer la route à l'œuvre de restauration entreprise par la bourgeoisie réactionnaire aidée en cela par l'opportunisme arriviste petit-bourgeois qui est la forme dominante de l'opportunisme aujourd'hui dans notre pays.
Le temps n'est plus loin où les travailleurs de notre pays s’identifieront complètement à ceux qui les gouvernent, si ceux qui les gouvernements constituent le parti des travailleurs agissant de concert avec eux.
II. LA FAILLITE DE L'OPPORTUNISME OU LA REVOLUTION EN FAILLITE
Ce ne sera certainement pas la Révolution qui sera en faillite, du fait de l'action néfaste des opportunistes. La Révolution dû-t-elle subir des défaites, amorcer des reculs, subir des déviations, est un mouvement irréversible. Des hommes peuvent faillir. Jamais ne peut faillir la marche irréversible vers le progrès de tout un peuple. C'est pourquoi la Révolution en tant que mouvement de l'immense majorité au profit de l'immense majorité ne peut faillir. L'opportunisme en tant que sécrétion et influence des classes décadentes, rejetées par la marche historique des événements, est condamné à la faillite. Il est condamné à la faillite.
Si ce n'est aujourd'hui, ce sera demain. Si ce n'est en cours, cela est en train. Si ce n'est ce mois, ce sera le mois prochain. Mais ce sont les peuples qui font l'histoire. C'est par la résultante des volontés individuelles des hommes que l'histoire prend telle ou telle orientation. C'est pourquoi, il faut œuvrer consciemment à la faillite de l'opportunisme et non attendre passivement que cela survienne tout seul.
Le peuple dans sa majorité répudie l'opportunisme et luttera pour sa faillite dès qu'il cernera tous ses contours dans ses diverses mouvances. Confiant aux ressources inépuisables de notre peuple, nous pouvons affirmer que l'on ne dira pas que la révolution est morte, vaincue par l'opportunisme. Et c'est pour vaincre l'opportunisme qu'il nous faut l'étudier suffisamment, comprendre ses racines sociales, expliquer pourquoi il est un phénomène inévitable dans cette grande lutte qui oppose le prolétariat à la bourgeoisie et qui n'aura de cesse qu'avec l'émancipation complète de toute l'humanité.
L'opportunisme n'est pas un trait particulier de notre lutte révolutionnaire. Il a ses causes essentielles dans le régime économique et social de notre pays, dans le caractère des transformations des rapports économiques et sociaux qui y sont entreprises.
Ce qui rend l'opportunisme inévitable dans notre société actuelle, c'est l'existence à côté du prolétariat de larges couches de la petite bourgeoisie, de petits patrons qui traînent derrière eux leur mentalité de petits propriétaires et toutes sortes d'influences héritées de la bourgeoisie. Ce fait est aggravé d'autant plus que notre pays est un pays paysan, un pays essentiellement petit bourgeois.
Or dans la mesure où la petite production engendre constamment le capitalisme, il devient compréhensible que des conceptions petites bourgeoises ne cessent d'apparaître et d'enfreindre la lutte révolutionnaire des masses.
Le système de la petite, production engendre à chaque instant et constamment la grande [Page 5] production capitaliste, il s'ensuit que le petit bourgeois génère à chaque instant et constamment la bourgeoisie, et que les conceptions petites bourgeoises ne font que ressusciter à chaque instant et constamment celles de la bourgeoisie en faillite. Telles sont les racines sociales de l'opportunisme qui le rendent inévitable, persistant et incisif.
La dialectique révolutionnaire tire sa justification du caractère dialectique de l'évolution qui s'accomplit dans des contradictions et par voie de contradictions. Il s'ensuit que la révolution marche de pair avec l'opportunisme. C'est dans la lutte contre l'opportunisme, que la révolution s'approfondit en accumulant des succès.
Il s'en suit qu'en chaque militant révolutionnaire existe des prédispositions à l'opportunisme, des dispositions favorables à être le véhicule de l'influence bourgeoise, de l'influence de la réaction au sein du mouvement révolutionnaire. Et ce n'est que dans la lutte et par la lutte que le militant révolutionnaire s'aguerrit et développe une pratique conséquente. Chacun de nous couve des tendances erronées qui, à des moments donnés, et face à des situations données, se développent et s'expriment en des actes erronés. Il y a une lutte perpétuelle entre les deux idéologies en chacun de nous. L'éducation idéologique, la pratique révolutionnaire ont pour but de nous prémunir de l'idéologie des classes réactionnaires pour faire nôtre la conception prolétarienne de la vie et du monde. C'est une lutte qui ne cesse qu'avec la mort de l'individu.
Il s'en suit que malgré ses diverses formes et nuances, l'essence de l'opportunisme est une et indivisible et ne peut être expliquée par le fait du hasard, ni par les erreurs ou déviations de telle personne ou de tels groupes de personnes.
2-1. L'essence de l'opportunisme est une et indivisible
Les diverses factions opportunistes constituent au sein du mouvement ouvrier en particulier et du mouvement révolutionnaire en général, un détachement politique de la bourgeoisie, un soutien social actif de la bourgeoisie et de l'impérialisme. Tant que durera la lutte des classes au sein de la société, l'opportunisme se manifestera toujours en tant que courant d'idées, en tant que pratiques sociales contraires aux intérêts des masses fondamentales. Malgré ces mutations, son essence demeure une et repose sur les fondements suivants :
a) De par ses fondements idéologiques : l'opportunisme est la subordination à l'idéologie bourgeoise réactionnaire. Il est le reniement de l'idéologie prolétarienne. Les deux idéologies sont incompatibles. Cette acceptation consciente de l'influence idéologique bourgeoise se traduit concrètement par la renonciation au point de vue de classes et à la lutte de classes. Ceux-là qui se laissent gagner par cette influence, nourrissent en eux une crainte quant à assumer une lutte révolutionnaire conséquente.
Au lieu de s'en tenir conséquemment sur des points de vue révolutionnaires face à un interlocuteur, ils préfèrent capituler, pensant ainsi s'assurer la bienveillance de ce dernier et éviter de s'attirer sa colère.
Partagé entre l’idéologie prolétarienne vers laquelle l'action des masses révolutionnaires l'entraîne irrésistiblement et l'idéologie bourgeoise pour laquelle ses intérêts individuels et sa veulerie le prédisposent naturellement, l'opportuniste ne peut adopter un point de vue ferme. Il ne peut avoir une conviction établie. Au gré des impératifs du moment et mû toujours et surtout par la préservation de ses intérêts égoïstes, il est prompt aux compromissions et aux reniements incessants. Dans ses reniements, l'opportuniste finit par se ranger armes et bagages dans le camp des ennemis des masses révolutionnaires. Il devient ainsi le renégat, l'apostat en prise avec sa conscience de traître et qui, à son corps défendant, clame pour se convaincre qu'il est toujours partie intégrante de la lutte révolutionnaire des masses, comme si quelqu'un cherchait à l'expulser hors des limites d'un processus au-delà duquel il s'est, déjà placé. L'opportuniste est appelé opportuniste parce que la fidélité à une idéologie, à une conviction, à une cause, à un parti, n'est pas chez lui en honneur. Ce qui chez lui est une donnée constante, c'est son âme bassement servile. Et ce qui fait chez lui force de loi, c'est la défense de ses intérêts individuels au mépris de principes et de toute considération. La seule conviction qui est établie en lui, c'est celle de son intérêt personnel. Pour la préserver, il est prêt à trahir ses compagnons de lutte, à les sacrifier sur l'autel du culte des intérêts individuels.
b) De par ses fondements politiques, l'opportunisme c'est la collaboration de classes, le manque de confiance dans les masses et la confiance dans la bourgeoisie et l'impérialisme.
Le caractère relativement pacifique de la période présente de notre Révolution a nourri la croissance prodigieuse de l'opportunisme. Dans cette période, on voit surgir diverses catégories de « héros des temps de paix », plus révolutionnaires que jamais, prêts à clamer haut le slogan de lutte « La Patrie ou la Mort», avec le secret désir de survivre lâchement à la Patrie.
La Révolution étant un mouvement au pouvoir, les militants sont appelés à assumer des responsabilités politiques et administratives en vue de mieux servir les intérêts des masses fondamentales. Dans une telle situation, on assiste au développement prodigieux du carriérisme et du larbinisme. Il apparaît une certaine catégorie de militants, courtisans serviles, prêts à lécher les bottes pourvu qu'ils soient promus à des postes de responsabilités. Hissés à ces postes, ils utilisent leur pouvoir pour se servir au détriment des masses. Ils arborent des airs de grands seigneurs, tout comme si la place qu'ils occupaient étaient le fait d'un héritage familial. Ils sont loin d'imaginer qu'un jour la Révolution pourrait avoir besoin de leurs services sur un autre front de lutte qui demande plus de sacrifices et moins d'honneurs.
Alors, on voit nos opportunistes se laisser aller à la démobilisation et à l'abattement général. Ils renient leurs proclamations d'hier. Ils demandent à se « replier » si l'on estime que leurs missions à tel ou tel poste de combat sont terminées ; Il faut entendre par là, si l'on estime les appeler à d’autres tâches qui nécessitent plus de sacrifices et moins d’honneurs et d’avantages matériels. Ce « repli » (tactique, devons-nous ajouter) est le départ d’une série de reniement. Les opportunistes sont devenus des renégats. Ils identifient leurs propres causes à celle des masses et veulent pour cela lever des troupes. Ils en appellent à la patience des hommes dont ils ont réussi à être les chefs. Ils les invitent à ne pas confondre les bourgeons d’aujourd’hui avec les fruits de demain qui les attendent.
Alors, il ne faut point s'arrêter, il ne faut point se replier (le repli tactique que voilà) au risque de se voir interdire ne serait-ce que l'ombre de l'arbre fruitier. Il est vrai qu'il faut mobiliser les gens sur la base de leurs intérêts. Mais tout de même, la petite bourgeoisie arriviste étale trop ostensiblement son intéressement égoïste.
Mais l'opportunisme pratique se camoufle dans un radicalisme théorique. Aujourd'hui, au Burkina Faso, le révolutionnaire qui se veut de bon teint, s'auto-proclame « Rouge ». Il s'autoproclame marxiste-léniniste. Il ne jure que par le marxisme, alors que sa pratique jure d'avec le Marxisme.
Il y a de cela quelques années (c'était en 1978), nous avons écrit dans un document interne à l'Organisation en vue d'assurer l'éducation idéologique de nos militants que : «être communiste, n'est pas un simple acte de foi. C'est avant tout et par-dessus tout, une transformation réelle et constante du comportement idéologique et de l'élévation du niveau politique. être communiste, c'est mener sa vie avec les intérêts de l'organisation et de la Révolution. C'est subordonner ses intérêts individuels aux intérêts supérieurs de l'organisation. C'est être un fidèle serviteur du peuple, en sachant travailler avec lui vivre avec lui et lutter avec lui.
Etre communiste c'est se porter aux devants des difficultés, être communiste c'est être honnête et sincère vis-à-vis de l'Organisation et vis-à-vis de ses camarades de lutte. C'est tenir le mensonge en honte ; c'est haïr l'hypocrisie.
Etre communiste, ce n'est pas une proclamation solennelle: ce n'est pas l'attitude d'un moment ; c'est l'être à tous les moments, pour la vie entière. C'est un choix quotidien ».
Mais, l'opportunisme aussi évolue avec le temps. Il a aujourd'hui recours aux techniques du « marketing » politique :
Vider le marxisme-léninisme de son âme et de sa pratique révolutionnaires tout en battant pavillon « marxiste » ; c'est le dernier mot de l'opportunisme aujourd'hui au Burkina Faso.
De même que l'on dit couramment, « à chaque jour sa peine », on pourrait affirmer que dans notre pays, sous le ciel de la Révolution Démocratique et Populaire, à chaque jour, son organisation « marxiste-léniniste » qui surgit en se proclamant « partie intégrante du processus révolutionnaire ». La porte étant largement ouverte depuis le 17 mai 1986, c'est la course à qui mieux mieux pour siéger autour de la table avec ceux qui « décident » du devenir de notre peuple. Aujourd’hui, les opportunistes ont compris qu'ils ne peuvent s'accrocher au train de la Révolution qu'en reconnaissant en parole les objectifs et la tactique de la Révolution. Mais, si l'on ne peut interdire à une firme commerciale de faire usage de n'importe quelle étiquette, de n'importe quelle enseigne ou publicité pour écouler sa marchandise, l'on peut tout au moins éduquer le peuple à faire le bon choix.
Dans la lutte révolutionnaire, il est un fait établi constamment confirmé et qui veut que quiconque insiste dans la conciliation avec l'opportunisme finit par sombrer dans l'opportunisme. Tous ceux qui ont jusque-là insisté dans l'entente avec l'opportunisme ont fini par en prendre ses qualités au détriment des qualités révolutionnaires et sont devenus des gens peureux, corrompus, prompts à lier leur destin à celui des classes décadentes alliées à l'impérialisme.
C'est ainsi que nombre de Camarades ont sombré petit à petit dans l'opportunisme et ne peuvent plus en sortir. Les al‑[Page 6] liances opportunistes se tissent autour de points subjectifs que l'on tient en commun et sont pour ce faire précaires. Elles se défont aussitôt que le motif subjectif cesse d'être le thème mobilisateur. Les opportunistes forment une seule famille. Ils s'adressent des louanges, se congratulent mutuellement. Ils se formulent des encouragements et s'instruisent les uns des autres, s'informent mutuellement. Ils créent une solidarité opportuniste et se portent secours, et mènent une campagne en commun en recourant à des manœuvres identiques. Les uns dans leur isolement et leur impuissance avouée lancent un appel aux autres « afin qu'ensemble, écrivent-ils, nous liquidons ce courant dangereux pour notre processus » opportuniste de restauration (ajouté par nous).
De même que nous considérons l'opportunisme comme un phénomène dangereux pour la Révolution, de même l'opportunisme nous tient pour dangereux pour sa survie. Quoi de plus normal ! Une seule conclusion s'impose. Face au Parti de la Révolution se dresse le Parti de l'Opportunisme. Cela a pour enjeu la continuation de la lutte révolutionnaire des masses ou le reniement de celle-ci. A cela rien de surprenant : « L'on ne peut atteler à la même charrette un cheval et un cabri frémissant ». Que les chevaux soient attelés ensemble et que les cabris frémissants le soient ensemble. Ainsi, chaque attelage pourra imprimer à la marche l'allure qui répond à sa nature et à son tempérament. Là, réside toute la signification de la lutte contre l'opportunisme et tout le contenu politique de cette lutte.
C) De par ses fondements socio-économiques
La majorité de la population de notre pays est constituée de paysans. La révolution qui s'y déroule à l'étape actuelle de la lutte de notre peuple est par conséquent une révolution paysanne. C'est de cette appréciation qu'elle tire son caractère bourgeois... Comme il a été précédemment écrit, tant que nous marchons avec toute la paysannerie, et nous marchons avec elle, notre révolution demeurera une révolution bourgeoise.
Le paysan c'est le petit propriétaire qui dans une économie de production marchande, incarne les rapports bourgeois de production. C'est le petit bourgeois par excellence chez qui la force de l'habitude constitue une véritable entrave qui l'empêche d'être révolutionnaire jusqu'au bout, c'est-à-dire conséquemment. il est plus facile, nous enseignait Lénine, de renverser les classes exploiteuses, de les supprimer que de lutter contre les petits producteurs de marchandises et leurs représentants.
« Ceux-ci, disait-il, on ne peut les chasser, on est obligé de faire bon ménage avec eux » pour les éduquer, les transformer au prix d'un long et patient travail d'organisation. Parlant de ces paysans, Lénine dit :
« Ils entourent de tous les côtés le prolétariat d'une ambiance petite bourgeoise, ils l'en pénètrent, ils l'en corrompent, ils suscitent constamment au sein du prolétariat des récidives de défauts propres à la petite bourgeoisie : manque de caractère, dispersion, individualisme, passage de l'enthousiasme à l'abattement ».
De cette juste appréciation de la petite bourgeoisie, il découle pour ses représentants intellectuels des prédispositions identiques :
- Le manque de caractère et le passage de l'enthousiasme à l'abattement:
« L'opportuniste est ainsi appelé parce que la fidélité aux principes n'est pas chez lui en honneur ».
L'ardent désir de militer aux côtés des masses révolutionnaires fait vite place (pour un oui ou pour un non) à l'attitude d'abattement et de basse trahison. Le petit bourgeois ballotte continuellement entre l'idéologie bourgeoise et l'idéologie prolétarienne. L'idéologie bourgeoise la plus répandue est celle qui s'impose à lui spontanément et qu'il travaille à ressusciter sous les formes les plus variées. Il est le véhicule de l'influence de la bourgeoisie au sein des masses révolutionnaires.
- La dispersion
La petite bourgeoisie intellectuelle dans son engouement pour les luttes intestines, les lutte de clocher pour l'émiettement, n'a peut-être pas conscience qu'il ne fait qu'attester cette vérité selon laquelle : « le théoricien de telle ou telle classe arrive théoriquement à une conclusion à laquelle la classe elle-même est déjà pratiquement arrivée ». Leurs conclusions théoriques sur la groupuscularisation est le résultat auquel leurs intérêts matériels et leur situation sociale les poussent pratiquement. Leurs ambitions de devenir chef les aveuglent au point qu'ils préfèrent se tailler un petit fief sur lequel ils peuvent régner. Et pourquoi pas, se disent-ils, n'est-ce pas là une position qui permet d'être invité à la table des « grands ? » Tête de rat vaut mieux que queue de lion.
- L’individualisme:
La petite bourgeoisie intellectuelle mue par ses intérêts individuels en arrive à vouloir faire passer sa propre cause pour la cause des masses révolutionnaires. Et le radicalisme théorique est la forme d'expression de opportunisme démasqué sur te terrain de la pratique révolutionnaire. Tels sont les rapports qui existent entre les représentants politiques et littéraires et la classe (et dans le cas d'espèce, la petite bourgeoisie) qu'ils représentent.
Aujourd'hui que nous sommes engagés dans la tâche d'organisation, tâche d'une portée nouvelle pour nombre d'entre nous et d'une difficulté sans précédent, chacun peut se convaincre de l'affirmation de Lénine selon laquelle « Ils est mille fois plus facile de vaincre la grande bourgeoisie centralisée que de "vaincre" les millions et les millions de petits patrons; or ceux-ci, par leur activité quotidienne, coutumière, invisible, insaisissable, dissolvante, réalisent les résultats mêmes qui sont nécessaires à la bourgeoisie, qui restaurent la bourgeoisie ».
Dans son œuvre de restauration, la bourgeoisie ne trouve pas seulement un point d'appui dans la force du capital international, dans sa liaison avec la bourgeoisie internationale, mais et surtout dans la force de la petite production, la force de l'habitude qui prévaut dans ce milieu. Et cela, nous devons en avoir une claire conscience pour nous armer dans la lutte qui s'avère longue et difficile contre l'opportunisme en général et l'opportunisme arriviste petit bourgeois en particulier. Et notre première tâche c'est d'apprendre à cerner l'opportunisme dans toutes ses mouvances sous toutes ses facettes en gardant toujours présent à l'esprit que quelles que soient les mutations que lui fait subir l'évolution sociale et économique, il demeure un et indivisible dans son essence.
2-3. les caractéristiques principales de l'opportunisme et ses diverses manifestations dans la Révolution en cours dans notre pays
Si l'opportunisme pouvait se laisser définir en une phrase, l'on pourrait dire qu'est considérée comme tel dans la situation concrète de notre pays, toute influence idéologique de la bourgeoisie véhiculée par les représentants de la petite production au sein du mouvement révolutionnaire des masses et qui se traduit pratiquement par une confiance en la force de de la bourgeoisie et de l’impérialisme et un manque de confiance en la force inépuisable des masses, par une attitude de collaboration des classes aux intérêts antagonistes et une renonciation à la lutte révolutionnaire des masses. De là découle le fait que les opportunistes constituent le détachement de la bourgeoisie et de l'impérialisme au sein du mouvement révolutionnaire pour dévoyer la lutte des masses. Ce sont les chargés de mission de la bourgeoisie, mandatés par elle pour œuvrer à la restauration bourgeoise.
A partir d'une telle définition générale, il nous faudra essayer d'examiner les diverses manifestations de l'opportunisme aujourd'hui dans notre pays.
a) Les transfuges de la bourgeoisie dans la Révolution
Ondoyant et mouvant telle une couleuvre, multicolore tel un caméléon, cette race d'opportunisme est douée de capacité d'adaptation inimaginable.
Toujours à la recherche des faveurs auprès des puissants du jour, on les surprend hier chantant les louanges des dignitaires de la IIIème République, puis du CMRPN, aujourd'hui plus révolutionnaires que jamais, psalmodiant les slogans révolutionnaires à l'ordre du jour. Mais, à y voir de près, on se rendra compte que de tels individus se sont ménagés des issues de secours avec des explications toutes faites pour se « blanchir » au cas où...
Hier, ils étaient de ceux-là chez qui les mots en « isme » provoquaient des sourires narquois sinon un mépris souverain. Au niveau des Universités, c'est cette catégorie d'étudiants qui a choisi consciemment de tourner le dos au militantisme révolutionnaire pour noyer la conscience d'appartenance à un peuple opprimé sous la domination et l'exploitation impérialiste dans un carriérisme forcené.
Aujourd'hui, on se demande quel discours a pu les mobiliser et les amener à la Révolution ? Tapis dans des lieux que leur seule présence déshonore, ils y sont et au lieu de s'estimer heureux du fait de cette gratitude de la Révolution, ils jouent aux petits malins et prennent pour cibles ceux-là qui avaient essayé en vain de les entraîner sur le chemin du militantisme révolutionnaire, et pour cause ! mauvaise conscience oblige !
Les masses révolutionnaires ont besoin du savoir de la bourgeoisie, de sa technicité, le temps qu'elles-mêmes s'en rendent maîtres. C'est pourquoi, la révolution bourgeoise ne peut et ne doit pas se passer des intellectuels bourgeois. Dans la mesure du possible, la révolution doit faire appel à leurs compétences pour servir les masses. Mais en aucun cas les révolutionnaires ne doivent se confondre à eux jusqu'au point d'oublier leurs origines et leur permettre d'influencer la politique révolutionnaire. Toute sous-estimation de l'action pernicieuse que les représentants intellectuels de la bourgeoisie (puisqu'ils ont choisi de l'être) sont à même d'entreprendre aux postes élevés qu'ils occupent, participe du processus de la restauration qui est et demeure l'objectif stratégique de la bourgeoisie nationale et internatio‑[Page 7] nale dans notre pays.
Il convient cependant d'établir une distinction entre ces intellectuels qui n'ont pas eu la chance du fait du milieu dans lequel ils ont évolué jusqu'alors de militer pour l'avènement de la Révolution et ceux-là qui en toute conscience s'en sont détournés et en ont combattu même l'idée.
Il ne convient pas non plus à partir de ces considérations de croire que parce que l'on a été révolutionnaire dès les premiers instants, on le demeure et surtout que l'on doit au nom de ce passé exiger tous les égards. Ce genre d'attitude a été déjà flétri sous la révolution et il n'y a pas lieu d'insister outre mesure.
La forme d'opportunisme décrite ci-dessus est la forme vulgaire de l'opportunisme qui prévaut dans notre pays et qui ne nécessite pas d'efforts particulier pour être démasqué. C'est l'opportunisme du bourgeois d’hier qui se voit contraint à porter aujourd’hui l’habit du révolutionnaire, tout en demeurant égal à lui-même.
La forme insidieuse de l’opportunisme, c’est celle qui se manifeste au sein même du mouvement révolutionnaire. Et c’est cela qui mérite une considération particulière.
b) Le radicalisme petit-bourgeois
Admirables, ils le sont dans leur persistance à l'orientation politique erronée qu'ils se sont tracée. Leur théorie n'ayant, aucune prise sur la réalité, la vie passe toujours à côté de ces révolutionnaires. Ils suppléent cette carence dans un radicalisme verbal et creux. Ils attendent de derrière la révolution, alors que celle-ci se déroule devant leurs yeux. Incapables qu'ils sont d'apprécier toute situation nouvelle, ils sont là toujours en train de ressasser de vieilles théories éculées. Sincères dans leur conviction, ils le sont et c'est ce qui, tout en les rendant louables à nos yeux, les rend plus dangereux. Il n'y a rien de plus dangereux que l'opportunisme sincère.
De tels révolutionnaires, la vie a fini par les confiner dans une situation triste de révolutionnaire de la phrase. La phrase révolutionnaire qui entraîne et enivre par son mordant, mais qui demeure sans prise sur la réalité. Ils critiquent la domination que l’impérialisme continue d’exercer sur certains secteurs d’activité de l’économie de notre pays, et s’élèvent contre toute mesure qui, reposant sur le principe de compter sur nos propres forces, vise à doter notre peuple des moyens de lutte contre cette mainmise. Peu leur importe que le pays s'endette auprès des organismes de la Finance internationale, pourvu qu'on ne leur demande pas un seul sou de leur poche en guise de sacrifice.
Mais, il y a fort longtemps que la vie les a marginalisés et il n'y pas lieu que nous nous en occupions outre mesure.
c) La bureaucratie et le bureaucratisme comme tendance et méthode néfastes de direction dans la Révolution
La bureaucratie et le danger de bureaucratisation d'un état révolutionnaire est une question d'une complexité et d'une importance extrêmes qui mériterait d'être traitée à part. Il faudra qu'elle soit l’objet d’une étude particulière. Nous l’aborderons dans ces pages dans le cadre général de notre analyse sur l’opportunisme général et la déviation qu'elle fait subir au processus révolutionnaire.
Dès qu'il est question, que ce soit au niveau d’un syndicat, d’une organisation politique ou d’un Etat, d'appareil et de fonctionnaires, l'existence du phénomène de bureaucratisation est posée en puissance. Il apparaît, dès lors que des hommes sont appelés à se spécialiser dans l’accomplissement des tâches générales de la Révolution. La tendance à la bureaucratisation est une tendance qui est absolument inhérente au développement même du mouvement ouvrier, a fortiori inévitable dans un Etat révolutionnaire. L'essor du mouvement ouvrier, l'apparition d'organisations de masses politiques ou syndicales est inconcevable, sans l'apparition d'un appareil de permanents, de fonctionnaires, de professionnels. Pour assurer l’efficacité de leurs organisations, les militants sont aménés à déléguer aux meilleurs d'entre eux le soin d’orienter et d'encadrer leurs luttes. Ces militants désignés au sein des organisations sont des professionnels, des fonctionnaires sensés être rompus aux problèmes de la lutte des classes et capables d'engager conséquemment les masses pour l'aboutissement victorieux de leurs revendications. Il arrive fort malheureusement que ces militants choisis parmi tant d'autres, se détachent progressivement des masses et se comportent non plus comme des serviteurs de la cause commune, mais comme une nouvelle catégorie de privilégiés prenant à cœur leur activité non comme un moyen, mais comme un but en soi. De même, les structures dont ils sont issus et qu'ils sont sensés servir ne sont plus conçues que comme des buts en soi.
Les individus finissent par s'identifier aux structures. Les bases idéologiques et psychologiques de la formation de la bureaucratie sont ainsi jetées. Et derrière les problèmes de la bureaucratie, il y a celui des privilèges et de la défense de ces privilèges. Ces privilèges peuvent être matériels, d'autorité et de pouvoir.
Marx et Engels ont écrit dans le Manifeste communiste que :« Les prolétaires n'ont rien d'autre à perdre que leurs chaînes ».
Et c'est là une vérité profonde qui dès qu'elle cesse d'être vérifiée pour une couche des ouvriers, annonce l'apparition d'une bureaucratie ouvrière, d'une aristocratie ouvrière.
Au sein du mouvement syndical de notre pays, on a pu assister à la constitution de « féodalité » syndicale. Le syndicalisme pour certains individus est devenu l'unique source de revenus sinon d'enrichissement. Une telle « situation de rentes » devenant la cause profonde de certains dirigeants syndicaux, il est alors aisé de comprendre l'existence de tendances conservatrices et de collaboration de classes qui prévalent dans certains syndicats.
« Le prolétariat, écrit Lénine, est opprimé, les masses laborieuses sont asservies par le capitalisme. En régime capitaliste, la démocratie est rétrécie, comprimée, tronquée, mutilée par cette ambiance que créent l'esclavage salarié, le besoin et la misère des masses. C’est pour cette raison, et seulement pour cette raison, que dans nos organisations politiques et syndicales, les fonctionnaires sont corrompus (ou plus exactement ont tendance à l'être) par l'ambiance capitaliste et manifestent une tendance à se transformer en bureaucrates, c'est-à-dire en personnages privilégiés, coupés des masses et placés au-dessus d'elles. Là est l'essence du bureaucratisme » (Lénine in L'Etat et la Révolution).
La bureaucratie inhérente à l'essor du mouvement ouvrier ne pourra cesser tant que durera la lutte du prolétariat contre la bourgeoisie, lutte qui a pour enjeu l'émancipation de l'humanité entière.
Le phénomène de la bureaucratisation, lorsque le mouvement révolutionnaire des masses devient un mouvement au pouvoir, c'est-à-dire dans la révolution, revêt encore une importance extrême, devient un facteur dissolvant du caractère de masse de la révolution, et si on n'y prend garde, participe des objectifs et de la tactique de restauration bourgeoise.
Sous la révolution, des postes sont confiés à des militants pour qu'ils y travaillent à réaliser les transformations nécessaires à sa consolidation et à son approfondissement. Très vite, ils arrivent au-delà du rôle qui leur est assigné, à s'attacher aux privilèges (matériels ou d'autorité) liés à ces postes. Ils en arrivent à identifier leur individualité à la fonction, et au poste. Dans une telle identification, quoi de plus normal qu'ils soient gagnés par une mentalité conservatrice qui repose sur la défense des privilèges ? Mus par une telle mentalité bourgeoise, chaque fois qu'il est question d'entreprendre une action nouvelle, il leur faut peser le pour et le contre: « Est-ce que l'action envisagée ne risque pas au lieu d'accroître mes privilèges, de me faire perdre ce que je possède déjà ?» Voilà le langage qu’ils se tiennent, animés qu'ils sont par la mentalité du petit bourgeois.
Il est bon et utile de peser le pour et le contre d'une action nouvelle. Mais, ce n'est pas en fonction de nos intérêts individuels, ni en fonction de l'intérêt immédiat du mouvement, mais toujours en fonction de l’intérêt général du mouvement, qu'il nous faut apprécier les actions nouvelles.
Un révolutionnaire ne saurait sacrifier l'intérêt général du mouvement à l'intérêt individuel. Il ne saurait sacrifier l'avenir du mouvement à son présent. Ainsi, sur la base de la consolidation de l'idéologie et de la psychologie du bureaucrate, il se développe une dialectique de la défense des privilèges. Ceux qui occupent les postes d'autorités ou de privilèges, veulent continuer à les occuper et les défendent au mépris de toute considération et entretiennent autour d'eux une nuée de courtisans serviles à souhait dont ils satisfont les ambitions et les utilisent en compensation à des basses besognes. Ainsi, la bureaucratie se nourrit et se régénère à partir des courtisans serviles.
La bureaucratie, lorsqu'elle devient un phénomène universel, c'est-à-dire toléré, constitue la base d'appui du processus de dégénérescence d'une révolution. Elle forme une nouvelle couche sociale de privilégiés conscients de leur situation, et qui se placent au-dessus des masses.
Le bureaucratisme comme méthode de direction se substitue à la ligne de masse. N'ayant aucune considération vis-à-vis des masses, le bureaucrate ne se soucie plus de savoir si ce qu'il fait, est ce que les masses veulent. Pourvu qu'elles suivent. De toute façon, elles suivront se dit-il, même si pour ce faire il faut recourir à la trique.
La révolution au pouvoir a ceci de fondamentalement différent des divers pouvoirs néocoloniaux qu'elle tire son fondement dans le mouvement de l'immense majorité du peuple. Elle exige la participation de cette immense majorité au profit de laquelle sont entreprises les transformations révolutionnaires. La révolution repose sur l'idée fondamentale selon laquelle l'émancipation des travailleurs ne peut être que l'œuvre des travailleurs eux-mêmes.
Cette idée ne doit être remplacée, ni en pratique, ni en théorie par l'idée qu'il revient au dirigeant (individu ou organe) d'émanciper les travailleurs et à faire la révolution à la place des travailleurs et en leur nom. Au [Page 8] quel cas, on se surprendra en train de faire la révolution contre les travailleurs dans certaines circonstances.
Depuis le déclenchement du processus de la révolution démocratique et populaire dans notre pays, on a beaucoup mis un accent particulier sur la participation active des masses dans les transformations révolutionnaires en cours. Des efforts ont été accomplis et des efforts sont encore à faire. C'est pourquoi, les attitudes propres aux bureaucrates qui visent à étouffer l'initiative créatrice des masses doivent être proscrites. Les bureaucrates au sein des organisations de masses, dans les services, découragent les masses dans leur mobilisation pour la défense de la révolution. Le soutien des masses, leur participation active et consciente, importent peu aux bureaucrates, mais ne laissent pas indifférent le militant révolutionnaire. Le bureaucrate ne peut diriger que des militants larbinisés et servilisés. Le révolutionnaire n'accepte de diriger que des militants consciemment mobilisés qui acceptent délibérément de s'engager dans la lutte révolutionnaire. Le militant révolutionnaire se distingue du bureaucrate par ce que celui-ci use de l'arme de la persuasion et celui-là, de l'arme de l'intimidation et de la menace. Le premier se distingue du second par ce qu'à l'arme du chantage et de la corruption, il préfère le travail de mobilisation patient, sur la base d'une adhésion librement consentie et qui repose sur la foi en l'idéal révolutionnaire. Il s'ensuit que la révolution et le bureaucratisme sont incompatibles, tout comme le sont le militant révolutionnaire et le bureaucrate. L'un est la négation de l'autre et c'est pourquoi, ils s'affrontent. L'enjeu de cet affrontement c'est la continuation de la révolution ou sa restauration.
d) Le larbinisme politique comme pendant de la bureaucratie au sein de l'appareil d'état
Ce qui flatte les bas instincts du bureaucrate, et qui l'encourage dans ses attitudes d'arrogance et de mépris vis-à-vis des masses révolutionnaires, c'est l'existence des opportunistes aux âmes serviles qui poursuivent la satisfaction de leurs intérêts dans un aplatissement honteux.
Le bureaucrate et le larbin à l'âme servile sont les revers d'une même médaille. Le bureaucrate autoritaire, impunément arrogant avec les masses est celui-là même qui se transforme en larbin servile devant l'autorité supérieure. Autant il aime à écraser tout ce qui existe en dessous de lui, autant il faut le voir s'aplatir devant tout ce qui est au-dessus de lui. La constante de ces deux attitudes contradictoires, c'est l'attachement au privilège d'autorité et de pouvoir. De même, le larbin qui au risque de se rompre l'échine dans des courbettes incessantes, n'attend que son tour d'être investi d'un quelconque pouvoir pour laisser apparaître le bureaucrate qui couve en lui.
Le larbinisme politique c'est le développement de l'incompétence, de l'incapacité théorique et pratique à s'élever à la hauteur des tâches révolutionnaires. Le larbin pense suppléer à ses carences, par ses actes d'allégeance.
Sur les fronts de lutte contre les ennemis de la révolution, le larbin est incapable de développer des initiatives et des répliques conséquentes. S'il ne capitule pas, la queue entre les pattes, il s'enflamme dans des invectives vaines et dans une profusion de menaces et d'intimidation. Pour si peu qu'on le contredise, il fait intervenir l'appareil de répression de l'Etat. C'est dans une telle attitude de facilité que l'on voit grandir une flopée de militants que l'on serait en droit d'appeler des « Révolutionnaires à papa ». Des « révolutionnaires » qui ne sont « révolutionnaires » qu'après que la révolution ait conquis le pouvoir et qui ne consentent à s'engager dans les batailles révolutionnaires que s'ils sont assurés du soutien de l'Etat révolutionnaire. C'est dire qu'avec de tels militants, la relève des révolutionnaires n'est pas encore assurée, mais celle des bureaucrates certainement.
e) Le réformisme et l'aventurisme
Lorsque le militant sous l'emprise de l'idéologie bourgeoise, en arrive à perdre la foi aux capacités prodigieuses des masses, et à s'effrayer devant la force de la bourgeoisie et de l'impérialisme, il se transforme en partisan de la collaboration de classes. Il devient timoré, et recommande la prudence et la conciliation avec l'ennemi. La révolution évolue trop rapidement à son goût déjà accoutumé à la transformation lente et sans heurts des choses. Une telle attitude n'est rien d'autre que du réformisme.
Le même militant, lorsque les choses commencent à aller, et qu'il a du regain de confiance en la révolution à cause des victoires remportées, est celui-là même qui trouve que la révolution piétine, qu'elle n'entreprend pas des transformations osées. Si on devait le suivre, dans ses propositions avant-gardistes, la révolution risquerait d'en souffrir. Son attitude relève de l'aventurisme. Le réformisme et l'aventurisme dans la lutte révolutionnaire des masses compromettent tous deux la marche victorieuse de la révolution. Ils sont les revers d'une même médaille et qui a pour nom l'opportunisme.
La racine du mal réside dans le fait qu'ils ne savent pas tenir un compte rigoureux des rapports de force au sein de la société et sur le plan international, afin de déterminer le rythme à imprimer au cours des transformations révolutionnaires.
Il y a une catégorie d'opportunistes difficilement classables et qui se singularisent dans la « surenchère ». Ils sont là toujours en train de surenchérir sur tout ce que dit le chef. Ce qui les anime plus que tout, c'est de plaire à tout prix au chef. Outre le fait qu'ils ne rendent pas un bon service au chef, de tels éléments ont pour seule motivation la recherche de leur maintien aux postes qu'ils occupent pour toujours jouir des privilèges qui y sont liés.
f) Le spontanéisme et l'anarchisme
Ces derniers temps sous le couvert de la lutte contre la « phrase révolutionnaire », on assiste à une véritable remise en cause du rôle de la théorie de la connaissance dans le processus révolutionnaire.
Cette volonté farouche d'amoindrir le rôle de la théorie au profit d'un praticisme étriqué, cache mal l'étroitesse d'esprit des uns et l'incapacité des autres à pouvoir s'élever à la compréhension profonde des choses. Si aujourd'hui, avec le vent de l'opportunisme qui souffle sous la révolution, chacun peut se réclamer révolutionnaire, il est une chose qui distinguera toujours les révolutionnaires conscients, des opportunistes de toute nuance. En effet, il n'est pas donné à tout le monde de comprendre et de posséder à fond la science de la révolution, la théorie de la lutte des classes. Ceux-là seuls peuvent accéder à la maîtrise de la connaissance théorique, qui adoptent le point de vue des masses révolutionnaires, ressentent au plus profond d'eux-mêmes leur situation d'oppression et d'exploitation et s'engagent avec elles pour vaincre ou mourir avec elles. On peut tromper les autres, on ne peut se tromper soi-même. L'opportunisme qui s'habille du manteau de la révolution peut tromper les autres, mais ne peut se tromper lui-même. Dans leur action de tromperie des masses, les opportunistes font preuve de beaucoup d’intelligence.
Mais il n'est possible à personne de comprendre et de posséder parfaitement la science de la lutte révolutionnaire des masses, par le seul moyen de son intelligence et de son étude assidue: c'est la raison pour laquelle, la bourgeoisie ne peut jamais s'assimilier le Capital de Marx. Elle ne le peut parce qu'à chaque ligne, à chaque page, sa conscience de classe possédante, de classe exploiteuse est heurtée, et son intelligence sombre dans la confusion, lui rendant ainsi la compréhension impossible.
Sans théorie révolutionnaire, il n'y a pas de mouvement révolutionnaire. Mais, il nous faut ajouter pour nous démarquer des exégètes de la théorie, que la théorie révolutionnaire est nécessairement liée à la pratique révolutionnaire.
De même il n'y a de pratique révolutionnaire que si elle est éclairée par une théorie révolutionnaire. Le mépris voué à la théorie révolutionnaire aboutit à une diminution du rôle de l'élément conscient ou, ce qui revient au même, au culte de la spontanéité. Or le spontanéisme est un opportunisme. La politique n'est pas une affaire de bon sens, encore moins la politique révolutionnaire qui est toute une science, la science de la lutte de classe des masses révolutionnaires.
La petite bourgeoisie en proie aux sentiments d'indignation vis-à-vis de l'exploitation et de l'oppression que la bourgeoisie exerce sur les masses populaires, si elle n'est pas guidée par une théorie révolutionnaire, verse dans l'anarchisme. L'anarchisme est l'idéologie de la petite bourgeoisie en proie avec le sentiment de lutte contre l'injustice, l'exploitation de l'homme par l'homme, mais incapable de formuler la voie révolutionnaire à même de débarrasser l'humanité de ces maux. Aussi, se lance-t-elle dans des actions isolées, désordonnées, qui ne peuvent faire subir que des défaites au mouvement révolutionnaire et reculer l'échéance de la victoire des masses. L'anarchisme est nuisible au mouvement révolutionnaire.
L'anarchisme, c'est l'absence d'une théorie révolutionnaire conséquente. Quant au fascisme, Georges Dimitrov, théoricien marxiste qui a profondément étudié le phénomène du fascisme, le caractérise comme la dictature violente et aveugle de l'aile la plus réactionnaire du capital financier.
Aujourd'hui sous la RDP, des opportunistes larbinisés et servilisés ont cru voir en l'expression composée de l’«anarcho-fascisme » une trouvaille pour masquer leur propre opportunisme. C'est dire qu'il y a des gens qui aiment s'auto-flageller. Sinon comment comprendre que ceux-là qui vouent un mépris à la théorie révolutionnaire, osent s'élever contre l'anarchisme ? Comment comprendre que ceux-là qui à défaut d'arguments théoriques ont recours aux « appareils d'Etat » pour en imposer à leurs interlocuteurs, osent s'écrier contre le « fascisme » ?
S'il y avait encore en eux quelque sentiment de pudeur, ils se seraient simplement tus en assumant leur opportunisme. Car l'expression composée d' « anarcho-fascisme » leur sied adéquatement. Il ne sied pas de parler [Page 9] lorsqu'on a la bouche pleine : On indispose. Le mieux serait de manger et en la fermant.
Ce sont là les caractéristiques principales de l'opportunisme et ses diverses manifestations telles que nous le vivons dans le présent processus révolutionnaire. Il se manifeste d'abord au sein du mouvement par des idées erronées, des actes larvés qui finissent par se développer et par se systématiser pour devenir un courant politique distinct. Dès lors, il s'érige en tant que mouvement ayant ses partisans, face au mouvement révolutionnaire. Dans la lutte acharnée que se livrent les révolutionnaires et les opportunistes, les premiers ont la sympathie de l'immense majorité des masses fondamentales et des révolutionnaires conscients. Les seconds sont appuyés et soutenus par leurs semblables. Et tout cela a pour enjeu le devenir de la Révolution. La position de la bourgeoisie réactionnaire alliée à l'impérialisme face à la révolution est claire. Il n'est pas moins clair la position des opportunistes. Il est du devoir des militants révolutionnaires d’en être conscients et de se mobiliser pour faire échouer les tentatives de la bourgeoisie. Les militants de notre organisation plus que quiconque ont une part importante à assumer dans cette lutte. Notre organisation a été plusieurs fois secouée depuis sa constitution par les menées liquidatrices des opportunistes de diverses nuances. Et dans la lutte contre ces diverses tentatives opportunistes, nous avons accumulé beaucoup d'expériences qu'il convient de faire connaître.
3. L'OPPORTUNISTE AU SEIN DE L'ORGANISATION
3- 1. Qu'est-ce qui se passe à l'ULC-R ?
Pourquoi des organisations politiques comme la nôtre, malgré leur orientation politique, malgré leur expérience de l'opportunisme, pourquoi donc, l'opportunisme y est si persistant et pourquoi la lutte que les militants conséquents doivent entreprendre contre ce phénomène est une lutte perpétuelle ? Quelles sont les sources de contradictions à l'intérieur de l'organisation et qui favorisent la naissance et le développement de l'opportunisme ?
Notre organisation est née et s'est renforcée dans une société concrète. Ces militants sont issus de toutes les couches de la société et vivent dans cette société où l'influence de l'idéologie des classes exploiteuses est prédominante. Ils sont dans leur majorité des petits bourgeois et traînent par conséquent avec eux toutes les tares contractées dans la société bourgeoise. Les sources de contradiction à l'intérieur de l'organisation sont donc liées d'une part à la composition essentiellement petite bourgeoise, et à la pression qu'exercent sur eux la bourgeoisie et l'idéologie bourgeoise. Dans ces conditions, il n'est donc pas étonnant qu'il existe au sein de l'organisation des conceptions erronées à partir desquelles se développent des pratiques erronées. La difficulté ne réside donc pas dans l'existence de divergences d'idéologie, d'opinion et de pratique au sein de l'organisation, mais de savoir comment triompher de ces divergences en éliminant les idéologies et les points de vue erronées. Et le moyen pour y parvenir c'est la lutte qui s'y mène et qui repose sur le principe de la critique et de l'autocritique. Dans cette lutte à l'intérieur de l'organisation, il peut arriver et il arrive souvent que les insuffisances et conceptions erronées se cristallisent pour donner naissance à une tendance qui se consolide sur la base de divergences profondes portant sur des points de principe, affectant ainsi l'unité de l'organisation dans son action.
L'arme de la critique et de l'autocritique a pour but d'éduquer les camarades qui sont dans l'erreur en vue de renforcer l'unité de l'Organisation.
Lorsqu'elle devient impuissante à ramener les éléments opportunistes aux points de vue justes et à une pratique conséquente, alors mieux vaut une scission qu'une unité frelatée. Il faut chasser de l'organisation les éléments opportunistes incapables de s'amender et qui nuisent à l'organisation. La tâche des militants conséquents, lorsqu'ils en arrivent à une telle conviction, c'est de travailler de sorte que cette séparation s'accomplisse dans les meilleurs délais et cela consciemment. Une telle séparation nous l'appelons scission, les éléments opportunistes aussi.
Il reste à savoir à qui revient l'initiative de la séparation.
Aucune organisation politique révolutionnaire au monde ne s'est constituée, ne s'est édifiée sans être passée par là. Sans avoir scissionné avec les compagnons de route petits bourgeois, il est pratiquement impossible à une organisation de s'édifier de façon révolutionnaire.
Ces tous derniers temps, on a pu assister à une agitation fébrile, débordant ayant pour but de jeter un discrédit sur notre organisation. Qu'est-ce qui se passe donc à l'ULC (R) ? Il se passe que l'ULC (R) se porte bien.
Il se passe que des renégats qui ont longtemps paralysé notre organisation, par des actes anarchistes de désorganisation ont fini par se révéler comme de vils traîtres et ont été chassés de nos rangs comme tels. Il se passe qu'une paire d’éléments traîtres, corrompus par l'esprit petit-bourgeois, par l'arrivisme ont été chassés de nos rangs, afin d'assurer à notre organisation une véritable unité. De même que les opportunistes de tout temps et de tout lieu, lorsqu'ils sont démasqués et chassés des rangs, nos deux renégats, pour pouvoir s'accrocher désespérément au processus révolutionnaire, sont allés chercher et trouver des motifs qu'ils veulent objectifs, leur ont donné un certain contenu théorique en partant en guerre contre de prétendus « chefaillons » qui seraient à la base de leur expulsion. Fidèles à la logique de tous les opportunistes et de tous les réactionnaires, ils adoptent le plan de bataille suivant :
« Dénigrons tel ou tel camarade, nous ferons pencher l'organisation de notre côté. Dénigrons! Dénigrons ! Il en restera toujours quelque chose ».
Il se passe que deux renégats traîtres, chassés de nos rangs, veulent faire prendre leur propre cause pour la cause de « la majorité » ( « les bolcheviks » que voilà !), pour la cause du prolétariat et des mases révolutionnaires dont ils ont d'ailleurs une peur bleue.
Voilà ce qui se passe à l'ULC (R). Voilà ce qu'il nous faut expliquer aux masses. Il nous faut expliquer aux masses que la scission avec l'opportunisme est inévitable et nécessaire et que c'est la raison pour laquelle nous avons chassé de nos rangs une bande d'arrivistes suffisamment intelligents pour comprendre qu'en dehors de la révolution, il n'y a point de salut pour eux. D'où leurs excitations. Il nous faut expliquer aux masses que la lutte au sein de notre organisation est le reflet de la lutte de classes qui s'opèrent au sein de la société et que ces deux luttes ne peuvent et ne doivent être dissociées. De même que les masses s'aguerrissent dans leurs luttes révolutionnaires contre leurs ennemis, de même l'organisation consolide son unité s'endurcit, se renforce et se développe au cours de la lutte qui se mène en son sein.
Nos opportunistes se sont beaucoup enflammés, et nous les avons laissé faire en gardant le silence. Mais convaincus que la sentence de leurs prétentions viendrait des masses. Si l'ignominie devait tuer son homme, il y a belle lurette que nos opportunistes en seraient morts. Aux yeux des masses révolutionnaires, nos opportunistes se sont couverts de honte, ils se sont déshonorés. Les masses révolutionnaires ont en horreur les hommes qui se prostituent après avoir prostitué tout ce qu'ils avaient de plus cher. Nos opportunistes ont prostitué leur idéal révolutionnaire pour lequel ils s'étaient engagés.
Les masses révolutionnaires ne prêtent pas d'attention à des lamentations d'hommes déçus et déchus, d'hommes désespérés se refusant de sombrer dans les ténèbres de l'oubli.
La « flamme » aux lueurs bien pâles, ne pourra rien changer à la destinée déjà bien sombre de ceux qui ont choisi d'embrasser la voie de la trahison.
Nous avons gardé le silence pour que de par leurs actions mêmes ils dévoilent leur véritable nature. C'est aujourd'hui chose faite.
« Tirez les premiers, Messieurs les opportunistes. Nous, nous tirerons en second. »
Lorsqu'un corps est gangréné, la question qui se pose est de savoir s'il faut tenter de refouler le pus dans l'organisme au nom de l' « unité » (avec le pus) ou bien s'il faut aider sa guérison complète, en le débarrassant de ce pus aussi vite et aussi soigneusement que possible, malgré les douleurs aigues mais passagères. Nous, nous avons opté pour la voie de l'opération chirurgicale en sectionnant la gangrène. Sans avoir liquidé ce pus qui empestait l'atmosphère de vie militante au sein de l'organisation, celle-ci ne serait en mesure de pratiquer efficacement et courageusement à la lutte des masses révolutionnaires. On ne peut aller en guerre en comptant dans ses rangs des éléments traîtres, des « agents de la 5ème colonne ».
Les crises ont toujours ceci d'utile, qu'elles mettent à nu la pourriture et rejette tout ce qui est conventionnel.
3-2. Notre expérience dans la lutte contre l'opportunisme en notre sein
Notre expérience dans la lutte contre l'opportunisme au sein de l'organisation nous a instruits sur le fait que la lutte des nuances dans l'organisation, la lutte d'influence en son sein sont inévitables et même nécessaire « tant qu'elle, comme l'indique Lénine, ne conduit pas à l'anarchie et à la scission, tant qu'elle se poursuit dans les limites approuvés, d'un commun accord par tous les camarades et membres » de l'organisation.
Or les opportunistes au sein de l'organisation ont toujours évité soigneusement d'engager la lutte sur le terrain des principes.
A la lutte idéologique, ils préfèrent la lutte « extra-idéologique » pour laquelle leur nature les prédispose.
Nous avons connus et chassé de nos rangs une telle catégorie d'opportunistes.
Nous avons aussi connu une catégorie d'opportunistes qui se sont refusé à faire une publicité des divergences qui les op‑[Page 10]posent à d'autres camarades, et ont à la faveur d'une majorité circonstancielle voulu exclure ces derniers à tour de bras, au mépris des principes organisationnels. Et face au refus opposé par toute l'organisation, ils se hâteront de provoquer une scission et s'autoproclamèrent « Bolcheviks », accusant les autres membres de l'organisation de « Centristes », « mencheviks » (minorité), disposés à la conciliation.
Voilà où l'erreur de précipitation dans la résolution des contradictions les a conduit. Du fameux courant « Bolchevik » il ne reste que quelques éléments en villégiature et qui ferait mieux de rentrer au pays pour s'éduquer en luttant aux côtés des masses révolutionnaires.
Mais tout ce qu'ils ont dit et écrit sur un des éléments parmi ceux qu'ils se proposaient d'exclure et qui, poussé par ses ambitions démesurées de devenir coûte que coûte « un chef » a développé des activités anarchiques, liquidatrices en dernière analyse, s'est révélé vrai.
Et aujourd'hui c'est sans peine que la majorité des camarades instruits à la pratique approuvent son expulsion de nos rangs. Il nous aura fallu du temps, mais nous y sommes quand même arrivés.
Notre expérience de lutte contre l'opportunisme au sein de l'organisation nous a édifié du fait que les opportunistes rejettent la lutte idéologique dans les structures et s'adonnent en dehors des structures, à la fausseté, à la falsification des sources et des causes réelles des divergences.
Ils œuvrent généralement à la réalisation de leurs objectifs, à coup de calomnies, de rumeurs et de racontars sur les qualités et les actes des personnes.
Ils sont de ceux-là qui ont toujours à la bouche, le respect des principes élevés et sont les premiers à les enfreindre.
Ils sont très prolixes lorsqu'il s’agit d'exposer les beaux principes généraux sur l'attitude correcte à observer entre camarades et on les surprend toujours dans les médisances sur des camarades, qu'ils préfèrent critiquer dans le dos.
Ils sont très aptes à formuler des propositions dans le contenu desquels la pureté révolutionnaire rivalise avec l'intransigeance propre aux radicalistes petit-bourgeois.
De telles propositions sont dans leur formulation théorique aisée à faire, mais dans la phase pratique de leur application, on se rend compte qu'elles ont été formulées pour que d'autres les appliquent et les défendent conséquemment tandis que ceux-là même qui les ont formulés s'y dérobent.
Ils sont prompts à rejeter leurs susceptibilités petites-bourgeoises sur autrui et se piquent de morgue, chaque fois qu'une petite critique leur est faite.
D'une petite critique, ils en font tout un problème, attrapent des ulcères et attendent l'occasion de déverser leur bile à propos d'un prétendu subjectivisme que l'on développe à leur encontre.
Mais avant que l'on arrive à ce stade, le mal qui a été longtemps couvé a eu le temps de briser la coquille idéologique, de s'éclore et de faire du chemin.
Ainsi de cette petite-divergence et de l'insistance qu'on y fait, surgissent de nouvelles divergences que l'on tente de hisser au premier plan en recherchant toutes les racines et les ramifications possibles pour sa justification.
On en arrive après que l'on se soit accoutumé soi-même à une telle situation, à oublier les origines du mal, à oublier son point de départ. La petite divergence a ainsi pris une importance énorme, et comme nous l'enseigne Lénine : « elle sert de point de départ à un volteface vers certaines divergences complémentaires se combinent avec des actes anarchiques conduisant le Parti à la scission ».
En somme l'expérience de lutte contre l'opportunisme au sein de l'organisation nous a instruit sur le fait, que l'individualisme est le fait marquant des éléments opportunistes en notre sein. Ce sont des gens qui aiment à placer leur intérêt personnel au-dessus de l'intérêt l’organisation. Dans leur subjectivisme petit bourgeois, ils sont aptes à ériger les griefs personnels en lutte de principe. Fainéants et incapables dans l'accomplissement des tâches théoriques comme pratiques, ils aiment à se tirer toute la couverture pour se glorifier des succès de l'organisation et ne se gênent pas pour rejeter tout ce qui peut être considéré comme des insuffisances de l'organisation sur autrui.
A l'intérieur de l'organisation, l'absence d'intégrité idéologique qui les caractérise, leur refus de se soumettre à la discipline, les conduits à des luttes sans principes et sont portés vers les luttes de clans, et le fractionnisme. Ils travaillent continuellement et consciemment à saper l'unité de l'organisation, en se faisant les rassembleurs de tous ceux qui pour une raison ou une autre (mais souvent pour des raisons d'ambition personnelle) sont des aigris.
3-3. La forme nouvelle de l'opportuniste en notre sein depis que nous sommes une organisation qui participe à la gestion du pouvoir d'Etat.
Déjà dans le rapport central présente et adopte lors de la 3ème Conférence nationale de l'ULC (R) tenue en août 1985, il est écrit :
« Une autre manifestation caractéristique de l'opportunisme, dont notre expérience de lutte jusque dans les années récentes, ne nous a pas encore instruits, dans une certaine mesure, c'est l'arrivisme petit bourgeois qui se manifeste au sein des organisations révolutionnaires qui participent à la gestion du pouvoir d'Etat. Dans une certaine mesure, avons-nous dit, parce que même au sein d'un mouvement révolutionnaire dans l'opposition où les conditions de lutte sont plus difficiles et où le militant risque de faire la prison, de perdre la vie, le carriérisme est un phénomène nocif. C'est cette même prédisposition à l'arrivisme et qui ne distingue en rien le militant révolutionnaire des militants des partis réactionnaires. (RDA, PRA, MILN, et autres GAP) qui se manifeste aujourd'hui avec force en notre sein, maintenant que nous sommes une organisation qui participe au pouvoir d’Etat. Tout comme les réactionnaires, nous n'arrivons pas à nous départir de l’idée que participer à l’exercice du pouvoir d’Etat, c’est prendre part au « partage du gâteau », Et ce « partage du gâteau » se traduit par la recherche frénétique de postes de direction, postes ministériels, etc…
Aussi, mu par de telles ambitions petites bourgeoises on en arrive à sacrifier l’« esprit de parti » au profit de la réussite individuelle. Alors la porte est ouverte aux courtisans de toute sorte, aux flagorneurs de tout acabit, prêt à se déculotter pour accéder ou se maintenir à un poste.
Comme dans la pratique, l'organisation est incapable d'obtenir des postes pour ses membres, ou de maintenir un de ses membres à son poste les militants retirent leur confiance à l'organisation et la place aux instances et aux individus à même de répondre à leurs ambitions. Dans ces conditions, il n'existe plus d’ « esprit de parti ». L'organisation n’existe plus que pour la forme. Libre cours est donné à l’habileté individuelle auprès des personnalités, des « autorités » à même d'épauler pour l'acquisition d’un poste. Certain camarades qui doivent leur ascension à l'organisation, qui doivent à l’organisation de les avoirs sorti de l’anonymat et propulsé sur la scène politique en arrivent à oublier leurs origines (sorti du trou) et à attribuer leur « réussite » à leur intelligence, à leur mérite personnel.
Ils affirment ne rien devoir à l'organisation qui apparaît aujourd'hui à leurs yeux comme un fardeau dont il faut se défaire. Dans de telles conditions, il n'est pas étonnant que des camarades en arrivent à vouloir sacrifier d'autres pour sauvegarder leurs propres intérêts. Dans ces conditions se pose la question de la survie de l'organisation qui subit le feu conjugué des opportunistes de l'extérieur comme de l'intérieur.
A l’extérieur, nos adversaires se sont jurés de désagréger l’organisation qu’ils caractérisent de « secte de templiers ». Ils ne ménagent aucun effort pour la scissionner. En ce sens, l’exemple de la LIPAD-PAI est sous nos yeux. Car le meilleur moyen de désagréger une organisation c’est d’encourager et de soutenir une scission en son sein et d’amener les différentes parties issues de la scission à se livrer une lutte sans merci, étalant ainsi aux yeux de l’opinion publique leur linge sale.
C’est pourquoi, « aujourd’hui dans le contexte présent toute action visant à affaiblir notre organisation, qu’on le veuille ou non, que cela soit conscient ou non, participe objectivement du plan de liquidation de notre organisation par ses ennemis extérieurs et intérieurs ».
C’est ce qui ressort du rapport central de la Conférence nationale d'août 1985. Bientôt deux ans que nous avons démasqué les opportunistes, comme de petits bourgeois arrivistes devenus des traîtres à la solde des ennemis de notre organisation et avec pour mission de la scissionner. Cette 3ème Conférence nationale a eu pour objectif de circonscrire au maximum leurs activités liquidatrices, d'armer nos militants en vue de faire échec à leurs manœuvres de sape.
La Conférence a été une victoire sur les opportunistes et une victoire pour les militants conséquents car l'unité de l'organisation s'est vue renforcée. Cela a permis de repousser l’échéance de la scission que les opportunistes voulaient opérer dans une situation de confusion totale favorable à la dissimulation de leurs véritables intentions liquidatrices sous le couvert de luttes de personnes.
Aujourd'hui, que le terrain de lutte s'est éclairci, et que l'ensemble des militants a pu les percevoir comme des traîtres, et qu'ils ne sont plus à même d'abuser quiconque, la rupture avec eux devient une nécessité. La scission intervient avec eux au moment même où leur traîtrise ne fait plus de doute aux yeux de l'ensemble des militants. Nous avons conservé et nous conservons toujours l'initiative. C'est ce qui fait rager les opportunistes traîtres et leurs commanditaires. Ils n’ont réussi à entraîner avec eux que quelques éléments du même acabit qu’eux.
Aujourd’hui, par conséquent, nous sommes à même d'affirmer que l’ULC(R) se porte bien ou tout au moins que l’ULC(R) se porte mieux.
Nos renégats n’ont pas eu le choix de leur départ. Nous le leur avons imposé, à un moment où ils se sont [Page 11] totalement démasqués aux yeux de l'ensemble de nos militants. Ils sont sortis de l'ULC (R) par la petite porte, sous la risée de l'ensemble de nos militants. Et c'est cela qui les fait rager. Et le silence, sinon l'indifférence que nous avons affichée face à leurs agitations fébriles, s'explique par la confiance que nous avons en la capacité de nos militants de rester fermes et de ne pas se laisser ébranler. Notre silence est la manifestation de cette confiance. Il y a longtemps que toute l'ULC (R) a été préparée à cette issue. Les débats qu'ils tentent de jeter sur l'arène publique ont été depuis longtemps menés en notre sein et ont été sanctionnés par des conclusions à la défaveur de nos opportunistes.
Aujourd'hui, nous rompons le silence pour simplement fournir quelques éléments d'explications sur les agissements de ces opportunistes, convaincus d'ailleurs que les masses révolutionnaires s'en sont fait un point de vue sans avoir eu besoin de notre intervention. Toujours en août 1985, nous avons soutenu dans le rapport présenté et adopté par la Conférence nationale ce qui suit :
« Fidèles à la pratique saine développée au sein de l'organisation, nous sommes d'avis que s'il y a des divergences entre camarades à quelque niveau que ce soit au sein de l'organisation, ces divergences doivent être exposées de façon circonstanciée. Le caractère et la profondeur de ces divergences doivent être élucidés au plus vite devant toute l'organisation. En dehors de l'organisation, en dehors des structures, les accusations contre tel ou tel camarade ne peuvent et ne doivent être prises que comme des racontars, des calomnies. Et ceux qui se livrent à une telle pratique, quelle que soit l'opinion qu'ils ont d'eux-mêmes, ils ne sont rien d'autre que des petits bourgeois incapables de subir une transformation qualitative. Nous sommes d'avis qu'il ne faut rien cacher aux membres de l’organisation. Tous les faits, les circonstances et les évènements pouvant constituer le thème d’agitation d’une scission éventuelle.
Il ne faut pas les sceller à l’Organisation et dans la mesure du possible, ne pas les sceller au grand public. Ces choses que l'on tient cachées, en cas de scission seront étalées au su du grand public. Et l'expérience des luttes que nous avons menées contre les éléments populistes du P"CR"V, les luttes menées en notre sein nous confirment dans cette position ».
Nous avons vu juste. Nos opportunistes chassés de nos rangs du fait de l’absence d'intégrité morale qui les caractérise, n'ont aucune retenue pour étaler au su du grand public, tous ces faits, mais en prenant soin de les accommoder à leurs convenances. C'est mieux ainsi. Mieux vaut une traîtrise ouverte, qu'une traîtrise camouflée. Ainsi, en parlant des assises de la Conférence nationale réunies les 30 et 31 août, les opportunistes en véritables apostats écrivent, traitant de la question sur « l'unification des forces de gauche » :
« Les militants ne surent jamais clairement quel est le point de vue de l'Organisation sur cette question. Une fois de plus l'ULC (R) a manqué de courage politique pour dire ce qu'elle pense ».
Que les opportunistes de l'ULC (R) ne surent jamais clairement le point de vue de l'Organisation, cela ils le doivent à leur incurie politique. Mais nos militants sincères, eux le savent. Cela fut l'objet d'une résolution adoptée à la Conférence et libellée en ces termes :
« SUR LA NECESSITE D'UNE ORGANISATION UNIQUE VERITABLE ORGANI-SATION D'AVANT-GARDE SEULE A MEME DE CONDUIRE CONSÉQUEM-MENT ET CONFORMEMENT AUX INTERETS DES MASSES OUVRIERES ET PAYSANNES LA REVOLUTION DEMOCRATIQUE ET POPULAIRE AU BURKINA FASO
- Considérant que le processus présent conduit sous la direction du CNR souffre de la dispersion et de l'émiettement des forces révolutionnaires ;
- Considérant que malgré les diverses approches, les organisations politiques qui participent au présent processus demeurent repliée chacune dans sa tranchée.
- Considérant ainsi l'esprit de chapelle et de clan, toute chose nuisible à l'unification de toutes les forces révolutionnaires au sein d'une organisation unique.
L'Union de lutte communiste (ULC-R), en ses assises de la 3ème Conférence nationale tenues à Ouagadougou du 30 au 31 août 1985 approuve :
- Le principe de sa dissolution progressive au profit d'un cadre unique marxiste-léniniste où ses militants aux côtés des militants des autres organisations politiques qui participent au présent processus, contribueront à la consolidation et à l'approfondissement du Processus Révolutionnaire déclenché depuis le 4 Août 1983 sous la direction du CNR.
- Invite toutes les organisations politiques qui participent au présent processus à faire de même dans l'intérêt supérieur de la Révolution. »
C'est clair !
L'opportunisme se voit ainsi démasqué dans ses tentatives grossières de falsification.
Il en est de même quant à l'accusation relative au fait que sur toutes les grandes questions de la Révolution, l'ULC (R) refuse de prendre position ou louvoie.
L'ULC (R) est une organisation membre du CNR, et à ce titre est invitée à se prononcer sur toutes les questions liées à la Révolution. Au sein de cette instance, notre organisation participe aux discussions en défendant fermement ses points de vue. Une fois qu'une décision est prise à l'issue de ces discussions, notre organisation qu'elle soit d'accord ou pas avec la décision, est tenue de l'appliquer et de la défendre. Et c'est ce que nous avons fait jusque-là. Il n'y a nul besoin, de publier à l'intention du grand public, que dans la prise de telle ou telle décision, la position de l'ULC (R) était celle-ci ou celle-là.
Toujours est-il que la conscience aiguë des militants de l'ULC(R) vis-à-vis de l'opportunisme s'est matérialisée à l'issue de la Conférence nationale d'août 1985 par l'adoption de la motion suivante :
« HALTE A L'ARRIVISME PETIT BOURGEOIS ET POUR LE DEVELOPPEMENT D'UNE PRATIQUE SAINE ET REVOLUTIONNAIRE QUI S'INSPIRE DE L'IDELOGIE DU PROLETARIAT REVOLUTIONNAIRE.
- Considérant que notre organisation depuis sa naissance en juin 1978 avec le "Groupe le PROLETAIRE" est composée essentiellement d'intellectuels de la petite bourgeoisie dont certains continuent de traîner avec eux, au sein de l'organisation du prolétariat les tares et les penchants des classes possédantes, notamment la tendance à la conciliation,
- Considérant que notre organisation consciente de cette réalité s'est fixée comme tâche, la transformation qualitative de ses membres dans le sens de la bolchévisation.
- Considérant que les pratiques opportunistes ont souvent dévié notre organisation de ses nobles objectifs, la plongeant ainsi dans une situation d'affaiblissement à travers notamment la crise, la scission et la dissolution momentanée,
- Considérant que notre organisation participe au pouvoir d'Etat dans le cadre du processus révolutionnaire en cours dans notre pays, ce qui crée objectivement des conditions favorables au développement de l'opportunisme petit bourgeois en particulier l’arrivisme à travers la course effrénée dans les postes de responsabilité dans les plus hautes instances dans l’appareil d’Etat en se servant de l’organisation comme tremplin,
- Considérant que cette tendance opportuniste est un danger actuel qui menace l'unité et la cohésion de notre organisation,
La 3ème Conférence nationale de l'ULC (R) réunie le 30, 31 août 1985 à Ouagadougou, stigmatise avec véhémence l'opportunisme, notamment l'arrivisme dans toutes ses manifestations ».
De même que les opportunistes le reconnaissent et comme chacun peut s'en convaincre, la lutte que nous avons assumée au sein de l'organisation contre leurs menées liquidatrices ne fut pas de courte durée. Leur expulsion de nos rangs fut le résultat d'une lutte intense et opiniâtre déclenchée depuis plus de deux ans et qui nous a demandé beaucoup de tolérance. Cette lutte a eu pour but de les démasquer totalement aux yeux de l'ensemble de nos militants à défaut de pouvoir les amener à s'amender par la critique et l'autocritique. Cette patience dans la lutte a porté ses fruits, puisque les renégats sont obligés de reconnaître leur forfaiture quand bien même ils s'autoproclament « majorité ». Où a-t-on vu une majorité être obligé de prendre la petite porte et sur la pointe des pieds avec la queue entre les pattes ? Drôle de « minorité » que celle qui contraint la « majorité » à aller s'organiser de façon parallèle dans un cadre nouveau !
Vive l'unité révolutionnaire des organisations révolutionnaires, affranchies de l'opportunisme !
La lutte à l'intérieur de notre organisation est une composante indispensable et essentielle de la lutte révolutionnaire des masses. Toute victoire qui y est enregistrée est une victoire du mouvement révolutionnaire dans son ensemble. Tout point marqué par l'opportunisme dans cette lutte vient en renforcement du courant opportuniste dans le mouvement révolutionnaire. La lutte que nous avons engagée contre nos opportunistes traîtres est une lutte dans laquelle nous n’avons pas sollicité de l’aide pour en venir à bout.
Il nous appartient de réduire à néant le pus que nous avons nous même secrété. Partout et à tous les niveaux une lutte résolue doit être livrée à l'opportunisme car la consolidation et le développement de la Révolution en dépend.
L'unité entre les révolutionnaires et les opportunistes constitués en courant est impossible. Quant à l'unité des organisations révolutionnaires, c'est d'abord leur rapprochement sur une base qui est d'abord politique et idéologique, vient ensuite le moment où le rapprochement se fera sur le terrain de l'organisation.
VIVE
LE MARXISME-LENINISME !
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